Moi je ne suis pas fan de la démocratie directe. Le référendum est en principe anti-démocrate à mon avis. On voit comment le référendum et le plébiscite trop souvent étaient deployés comme outil de la réaction populiste. L'histoire récente du référendum n'est pas distinguée--Brexit me vient en tète. On doit s'interroger sur: les rédacteurs de la question posée, leur but, la contenu de question, le timing, etc.
Un grand merci pour votre commentaire. Vous avez mis le doigt sur un point essentiel du débat.
La thèse centrale du livre est que la pratique régulière du référendum peut aider à freiner la montée du populisme. Le mot clé ici, c'est "régulière". C'est cette régularité qui fait toute la différence.
Mouai, ça semble un peu facile de rejeter la démocratie participative pour encenser le référendum juste après, et il aurait été judicieux que de rappeler que ce dernier est une réponse à une question posée et non un choix que font les citoyens. Dois-je rappeler ce qu'il s'est produit avec le dernier référendum que nous avons connu ?
Jouons le jeu malgré tout, admettons que le référendum soit étendu, ce qui serait une bonne chose, admettons aussi que le référendum se transforme en véritable choix démocratique, et non plus une simple question. Dans le cas-là, ç'aurait été mieux d'étendre la réponse de l'auteur, expliquer pourquoi il juge la démocratie participative comme tel :
“La démocratie participative est ainsi devenu le hochet privilégié d’une classe politique qui refuse la démocratie directe. C’est pire qu’un compromis : c’est une façon d’éviter la véritable participation du peuple tout en prétendant la favoriser. La seule participation qui vaille est celle qui donne un réel pouvoir de décision. Tout le reste - débats, assises, concertations, conventions - n’est que de la poudre aux yeux.”
J'ai l'impression qu'il a voulu écrire un beau paragraphe… mais c'est tout. En quoi la démocratie participative et le référendum ne pourraient-ils pas être complémentaires ? Il semble défendre son bout de gras en somme, ce que convenaient les anciens comme étant le meilleur régime (“les meilleurs régimes sont ceux qui prennent un peu à l'aristocratie, un peu à la monarchie, un peu à la démocratie”), mais ce n'est pas défendre la démocratie ça. C'est, à la rigueur, pointer du doigt le manque de démocratie en France, mais c'est tout… et malheureusement un peu limité.
Merci pour votre commentaire. J'ai synthétisé, peut être un peu trop.
Alors je me rattrape ici ;
Voici quelques éléments abordés dans le livre, en particulier ceux qui amènent au paragraphe que j'ai cité dans cette édition :
- La démocratie participative s'est développée depuis le dernier référendum de 2005, davantage comme un outil de communication que comme un mécanisme de démocratie directe. Elle ne permet pas aux citoyens d'exercer pleinement le pouvoir ni de voter les lois.
- Par exemple, la Convention citoyenne pour le climat (150 personnes tirées au sort) a formulé 149 propositions, mais seulement un très petit nombre d'entre elles a finalement été voté et mis en œuvre.
- En plus du résultat final, la méthodologie de tirage au sort utilisée pour cette convention soulève des questions de représentativité, et l'encadrement du groupe de travail peut influencer l'orientation des propositions.
Sur la questions de la question justement, la mécanique proposé est de passer par le parlement afin qu'elle soit le résultat d'une délibération collective.
Concernant la démocratie participative, encore une fois, on retrouve peu ou prou les mêmes défauts que pour le référendum : ce dernier ne permet pas non plus de voter les lois puisqu'il s'agit d'une question posée au peuple… et j'ai un peu de mal avec l'argument comme quoi ce serait un « outil de communication » tant j'ai l'impression qu'il pourrait aussi se retourner contre le référendum (la frontière entre référendum et plébiscite est poreuse). J'imagine qu'il faut partir de la logique suivante : le peuple ou l'assemblée s'organise, grâce à un article 11 étendu, pour qu'une question puisse être soumise au peuple ; à partir de là, on peut dire que c'est le peuple qui choisit les grandes orientations du pays. On se rapproche donc du mandat impératif… qui n'a jamais été véritablement appliqué, même dans les pays qui l'avaient plus ou moins mis en place (France de 1793, début de l'URSS, Chine…). Cela dit, je reste plutôt pour ce genre d'initiative… m'enfin, ce n'est pas le sujet.
Là où j'ai du mal du coup, c'est de se limiter au référendum étendu. Pourquoi ne pas tenter le coup, à la fois d'étendre le pouvoir que les citoyens ont sur les grandes orientations du pays, mais aussi, à une échelle plus micro, d'instaurer des conventions, des assemblées citoyennes, sur divers sujets ? Certes, certaines n'ont pas été mis en œuvre, mais pourquoi ? On sait que Macron en a rejeté quelques-unes, mais à ce compte-là, on aurait juste à interdire au Président de se mêler au résultat final. Je veux bien admettre qu'il y a eu des problèmes avec cette convention constituée sur demande d'Édouard Philippe (logique qu'on soit déçu du résultat final du coup), mais si on rejette ce genre d'outils démocratiques, car le résultat final n'a pas été appliqué, alors il faut aussi rejeter le référendum dont la dernière utilisation n'a pas été appliquée non plus… ce fut même l'inverse en fait.
Concernant le dernier paragraphe, là aussi, on pourrait retourner ces défauts contre le référendum. Peut-on parler de représentativité quand seulement la moitié des citoyens votent ? Peut-on faire fi de l'influence qu'exercent les médias sur les citoyens lors de ces mêmes référendums ?
Là où j'ai du mal en fait c'est… pourquoi s'arrêter là ? Pourquoi mettre tant en avant le référendum et rejeter la démocratie participative alors que les deux pourraient se révéler complémentaire, alors que les deux outils possèdent des défauts, dont certains qui pourraient être corrigés ? J'ai toujours du mal avec les « démocrates » qui placent l'indicateur démocratique à un endroit particulier et se disent « là, on est bien, pile-poil le bon degré de démocratie qu'il nous faut », sans trop expliquer pourquoi. J'ai toujours l'impression qu'on a envie de me la faire à l'envers, qu'on me cache quelque chose.
Bien sûr, on ne peut pas rentrer dans une sorte de démocratie absolue, il faut parfois léguer le pouvoir aux experts (ça concerne l'armée, l'hôpital, l'école… un peu tout en fait), mais il faut que ce soit justifié… et en l'occurrence, j'ai peu de mal avec les arguments employés par l'auteur.
Je pense que l'objectif est de trouver la meilleure solution à la crise démocratique. Je n'ai pas lu qu'il interdirait l'usage de la démocratie participative, mais il est clair que ce n'est pas sa préférence.
Concernant la dimension locale versus nationale, je pense que les deux se complètent plutôt que de s'opposer. Les référendums locaux sont un excellent moyen pour chacun de s'approprier une démocratie concrète. L'Oregon et la Californie ont bien intégré cette dimension.
Je suis d'accord avec vous sur le rôle des médias, c'est un vrai sujet. Cependant, le dernier référendum montre que cela ne fait pas tout, et depuis, le paysage médiatique s'est élargi avec YouTube et les réseaux sociaux.
En ce qui concerne la représentativité, les taux de participation aux référendums ont été supérieurs à 50 % sous la Cinquième République, à deux exceptions près (Nouvelle-Calédonie, Quinquennat). La pratique régulière du référendum sous De Gaulle n'a pas entraîné d'érosion du taux de participation. Bien qu'il y ait une part de circonstances, cela démontre qu'il n'y a pas de fatalité à une 'fatigue référendaire'.
🗳️ Merci Alexandre pour ce résumé clair et stimulant de l’essai de Raphaël Doan !
Tu m’as donné envie de relire Rousseau et d’actualiser ma carte électorale. Un miracle !
Merci beaucoup ! Si cet essai arrive à faire lire Rousseau ET à motiver pour les démarches administratives, il mérite clairement un prix 😄
Moi je ne suis pas fan de la démocratie directe. Le référendum est en principe anti-démocrate à mon avis. On voit comment le référendum et le plébiscite trop souvent étaient deployés comme outil de la réaction populiste. L'histoire récente du référendum n'est pas distinguée--Brexit me vient en tète. On doit s'interroger sur: les rédacteurs de la question posée, leur but, la contenu de question, le timing, etc.
Bonjour Lisa,
Un grand merci pour votre commentaire. Vous avez mis le doigt sur un point essentiel du débat.
La thèse centrale du livre est que la pratique régulière du référendum peut aider à freiner la montée du populisme. Le mot clé ici, c'est "régulière". C'est cette régularité qui fait toute la différence.
Idée intéressante
Mouai, ça semble un peu facile de rejeter la démocratie participative pour encenser le référendum juste après, et il aurait été judicieux que de rappeler que ce dernier est une réponse à une question posée et non un choix que font les citoyens. Dois-je rappeler ce qu'il s'est produit avec le dernier référendum que nous avons connu ?
Jouons le jeu malgré tout, admettons que le référendum soit étendu, ce qui serait une bonne chose, admettons aussi que le référendum se transforme en véritable choix démocratique, et non plus une simple question. Dans le cas-là, ç'aurait été mieux d'étendre la réponse de l'auteur, expliquer pourquoi il juge la démocratie participative comme tel :
“La démocratie participative est ainsi devenu le hochet privilégié d’une classe politique qui refuse la démocratie directe. C’est pire qu’un compromis : c’est une façon d’éviter la véritable participation du peuple tout en prétendant la favoriser. La seule participation qui vaille est celle qui donne un réel pouvoir de décision. Tout le reste - débats, assises, concertations, conventions - n’est que de la poudre aux yeux.”
J'ai l'impression qu'il a voulu écrire un beau paragraphe… mais c'est tout. En quoi la démocratie participative et le référendum ne pourraient-ils pas être complémentaires ? Il semble défendre son bout de gras en somme, ce que convenaient les anciens comme étant le meilleur régime (“les meilleurs régimes sont ceux qui prennent un peu à l'aristocratie, un peu à la monarchie, un peu à la démocratie”), mais ce n'est pas défendre la démocratie ça. C'est, à la rigueur, pointer du doigt le manque de démocratie en France, mais c'est tout… et malheureusement un peu limité.
Merci pour votre commentaire. J'ai synthétisé, peut être un peu trop.
Alors je me rattrape ici ;
Voici quelques éléments abordés dans le livre, en particulier ceux qui amènent au paragraphe que j'ai cité dans cette édition :
- La démocratie participative s'est développée depuis le dernier référendum de 2005, davantage comme un outil de communication que comme un mécanisme de démocratie directe. Elle ne permet pas aux citoyens d'exercer pleinement le pouvoir ni de voter les lois.
- Par exemple, la Convention citoyenne pour le climat (150 personnes tirées au sort) a formulé 149 propositions, mais seulement un très petit nombre d'entre elles a finalement été voté et mis en œuvre.
- En plus du résultat final, la méthodologie de tirage au sort utilisée pour cette convention soulève des questions de représentativité, et l'encadrement du groupe de travail peut influencer l'orientation des propositions.
Sur la questions de la question justement, la mécanique proposé est de passer par le parlement afin qu'elle soit le résultat d'une délibération collective.
Concernant la démocratie participative, encore une fois, on retrouve peu ou prou les mêmes défauts que pour le référendum : ce dernier ne permet pas non plus de voter les lois puisqu'il s'agit d'une question posée au peuple… et j'ai un peu de mal avec l'argument comme quoi ce serait un « outil de communication » tant j'ai l'impression qu'il pourrait aussi se retourner contre le référendum (la frontière entre référendum et plébiscite est poreuse). J'imagine qu'il faut partir de la logique suivante : le peuple ou l'assemblée s'organise, grâce à un article 11 étendu, pour qu'une question puisse être soumise au peuple ; à partir de là, on peut dire que c'est le peuple qui choisit les grandes orientations du pays. On se rapproche donc du mandat impératif… qui n'a jamais été véritablement appliqué, même dans les pays qui l'avaient plus ou moins mis en place (France de 1793, début de l'URSS, Chine…). Cela dit, je reste plutôt pour ce genre d'initiative… m'enfin, ce n'est pas le sujet.
Là où j'ai du mal du coup, c'est de se limiter au référendum étendu. Pourquoi ne pas tenter le coup, à la fois d'étendre le pouvoir que les citoyens ont sur les grandes orientations du pays, mais aussi, à une échelle plus micro, d'instaurer des conventions, des assemblées citoyennes, sur divers sujets ? Certes, certaines n'ont pas été mis en œuvre, mais pourquoi ? On sait que Macron en a rejeté quelques-unes, mais à ce compte-là, on aurait juste à interdire au Président de se mêler au résultat final. Je veux bien admettre qu'il y a eu des problèmes avec cette convention constituée sur demande d'Édouard Philippe (logique qu'on soit déçu du résultat final du coup), mais si on rejette ce genre d'outils démocratiques, car le résultat final n'a pas été appliqué, alors il faut aussi rejeter le référendum dont la dernière utilisation n'a pas été appliquée non plus… ce fut même l'inverse en fait.
Concernant le dernier paragraphe, là aussi, on pourrait retourner ces défauts contre le référendum. Peut-on parler de représentativité quand seulement la moitié des citoyens votent ? Peut-on faire fi de l'influence qu'exercent les médias sur les citoyens lors de ces mêmes référendums ?
Là où j'ai du mal en fait c'est… pourquoi s'arrêter là ? Pourquoi mettre tant en avant le référendum et rejeter la démocratie participative alors que les deux pourraient se révéler complémentaire, alors que les deux outils possèdent des défauts, dont certains qui pourraient être corrigés ? J'ai toujours du mal avec les « démocrates » qui placent l'indicateur démocratique à un endroit particulier et se disent « là, on est bien, pile-poil le bon degré de démocratie qu'il nous faut », sans trop expliquer pourquoi. J'ai toujours l'impression qu'on a envie de me la faire à l'envers, qu'on me cache quelque chose.
Bien sûr, on ne peut pas rentrer dans une sorte de démocratie absolue, il faut parfois léguer le pouvoir aux experts (ça concerne l'armée, l'hôpital, l'école… un peu tout en fait), mais il faut que ce soit justifié… et en l'occurrence, j'ai peu de mal avec les arguments employés par l'auteur.
Je pense que l'objectif est de trouver la meilleure solution à la crise démocratique. Je n'ai pas lu qu'il interdirait l'usage de la démocratie participative, mais il est clair que ce n'est pas sa préférence.
Concernant la dimension locale versus nationale, je pense que les deux se complètent plutôt que de s'opposer. Les référendums locaux sont un excellent moyen pour chacun de s'approprier une démocratie concrète. L'Oregon et la Californie ont bien intégré cette dimension.
Je suis d'accord avec vous sur le rôle des médias, c'est un vrai sujet. Cependant, le dernier référendum montre que cela ne fait pas tout, et depuis, le paysage médiatique s'est élargi avec YouTube et les réseaux sociaux.
En ce qui concerne la représentativité, les taux de participation aux référendums ont été supérieurs à 50 % sous la Cinquième République, à deux exceptions près (Nouvelle-Calédonie, Quinquennat). La pratique régulière du référendum sous De Gaulle n'a pas entraîné d'érosion du taux de participation. Bien qu'il y ait une part de circonstances, cela démontre qu'il n'y a pas de fatalité à une 'fatigue référendaire'.
Sujet et conversation passionnants !